Le vécu des hommes lors des traitements de procréation médicalement assistée

Les techniques de procréation médicalement assistée telles que la fécondation in vitro et l’insémination intra-utérine redonnent de l’espoir à de nombreux couples confrontés à l’infertilité. Chaque année, des milliers de femmes et d’hommes québécois deviennent parents grâce aux traitements offerts dans les cliniques de fertilité. 

Ces traitements peuvent néanmoins générer beaucoup de stress en raison des nombreux rendez-vous médicaux, des injections quotidiennes, des interventions contraignantes ainsi qu’un sentiment de perte de contrôle, particulièrement pour les femmes. Étant au centre des traitements, la conciliation avec la vie professionnelle peut représenter un véritable défi pour elles en plus de vivre les effets secondaires sur l’humeur en raison de la prise d’hormones

Sentiments de déception chez les hommes

Du côté des hommes, ils peuvent également vivre une diversité d’émotions allant de la colère, à la honte en passant par un sentiment d’incompréhension et d’injustice, et souvent une diminution de l’estime de soi. L’annonce de l’infertilité masculine est généralement vécue comme un choc, un moment douloureux tel qu’en témoignent les propos de Jean âgé de 34 ans  : « apprendre que t’es infertile, c’est un choc, c’est comme une claque en plein visage. Ma virilité en a pris un coup! ». De nombreux hommes vivent également des sentiments de culpabilité et d’échec à la suite du diagnostic d’infertilité. C’est pour plusieurs d’entre eux une véritable blessure à leur identité masculine. 

Après plusieurs échecs de traitements, tout comme chez les femmes, des réactions émotionnelles s’apparentant à celles d’un deuil peuvent s’installer : «j’ai envie d’y croire, mais quand le résultat est négatif, c’est la déception. Au début, je pensais que ça ne m’atteignait pas, je suis plutôt optimiste mais j’ai très mal vécu la troisième fécondation in vitro… J’avais envie de rien faire. J’étais déprimé ». 

Se sentir à sa place

Selon les résultats d’une récente étude (Genesse et al., 2019), les hommes trouveraient difficile de voir souffrir leur conjointe et se sentiraient mis à l’écart du processus médical. En effet, il peut être difficile pour eux de trouver leur place puisque, tel que mentionné précédemment, les traitements sont principalement centrés sur les femmes. Questionné sur la façon dont il vit les traitements de fertilité, Jean répond que  « dans ce type de procédure médicale, les femmes subissent des traitements lourds et compliqués. La femme est au centre du traitement, ce qui m’a fait vivre un sentiment d’inutilité. Même quand j’accompagne ma conjointe, je ne me sens pas toujours à ma place ». 

Les hommes peuvent également se sentir anxieux à l’idée de devoir produire un échantillon de sperme à la clinique et vivre des sentiments de gêne et d’inconfort dans cette situation comme l’explique Jean : « produire un échantillon de sperme à la clinique le matin avant d’aller travailler, c’est ordinaire! ». Des manifestations anxieuses peuvent également apparaître à l’approche d’une chirurgie visant à prélever directement les spermatozoïdes des testicules.

Beaucoup d’hommes ont tendance à taire leur souffrance durant leur parcours en fertilité pour se montrer forts, disponibles et soutenants à l’égard de leur partenaire. 

Quelques conseils

Si vous avez de la difficulté à trouver votre place pendant les traitements de fertilité, si vous vous sentez mis de côté ou même impuissant face à la souffrance de votre conjointe, vous pourriez :

  • Accompagner votre conjointe lors des rendez-vous et examens médicaux; 
  • Vous occuper de l’achat de la médication à la pharmacie et procéder aux injections d’hormones; 
  • Être à l’écoute de ce que vit votre partenaire (sans nécessairement chercher une solution) et lui demander ce dont elle a besoin pour se sentir mieux;
  • Communiquer à votre conjointe vos sentiments. Beaucoup d’hommes ont l’impression que de parler de leur propre souffrance va alourdir celle de leur partenaire. Or, bien souvent, c’est l’effet contraire qui se produit. Le partage des sentiments dans ce contexte peut permettre à l’un et l’autre de se sentir moins seul.e. et mieux compris.e.

*Veuillez noter que pour des raisons de confidentialité, le prénom a été modifié. Le témoignage du présent article a été recueilli dans le cadre d’un projet de recherche. 

Genesse, D., Bécotte, K., Brassard, A., Purcell-Lévesque, C., & Péloquin, K. (1019). L’expérience psychologique masculine et féminine de l’infertilité: Différences et similitudes. Revue canadienne de santé mentale communautaire, 38 (3), 135-150.

Publié le 3 février 2023 dans Procréation | Fécondation in vitro | Infertilité masculine | Accompagnement psychologique

Marie-Alexia Allard
Par : Marie-Alexia Allard PhD, Psychologue

Marie-Alexia Allard, PhD, psychologue clinicienne et membre de l’Ordre des Psychologues, se spécialise dans le domaine de la fertilité et de la périnatalité depuis plusieurs années.


Elle accueille des adultes et des couples qui font face à l’infertilité et qui ont recours aux procréations médicalement assistées. Elle offre des services psychologiques variés qui visent à aider les femmes et les hommes à réduire l’anxiété et à mieux vivre les traitements de fertilité. Elle accompagne les individus dans les aléas de leur projet parental et leur offre du soutien et un espace de réflexion tout au long de leur démarche.


Dre Allard se spécialise également en périnatalité. Elle rencontre des femmes et des hommes qui vivent un deuil périnatal, qui souffrent d’anxiété ou de dépression durant la grossesse et la période du postpartum ou encore qui éprouvent des difficultés à s’adapter à l’arrivée d’un enfant.


Elle travaille selon une approche intégrative qui respecte le rythme et les besoins de chacun.

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